Dans le règne animal, opération par laquelle un individu adulte oblige un individu dépendant à se nourrir par lui-même. Par exemple chez l’homme, ne plus demander le sein. Les modalités du sevrage varient selon les espèces. Du point de vue éthologique (science du comportement) elles définissent des modèles comportementaux profonds (différenciation symétrique), l’autre source étant le comportement sexuel (différenciation complémentaire).
À travers la problématique de l’homoérotisme*, ma recherche anthropologique a porté une attention particulière à la sexuation des modèles comportementaux, mais elle est prise depuis l’origine dans une problématique de sevrage. Les circonstances qui clôturent mon premier séjour en 2003 s’interprètent comme un sevrage brutal de l’observateur sociologue, dont Ziad est le témoin impuissant. Ma conversion au retrait en 2007 s’interprète également comme l’aboutissement d’un processus de sevrage dans mes rapports avec les Yéménites. Cette démarche m'a valu d’autres complications, car à contre-courant d'un paradigme postcolonial* favorisant plutôt les modèles de dépendance complémentaire. La problématique du sevrage est pertinente pour comprendre, depuis cette date, mes rapports avec les musulmans diplômés*.
Bien que le terme apparaisse régulièrement chez Bateson, mon auteur de référence (voir la notion de schismogenèse*), je n’ai investi le concept de sevrage qu’en avril 2024 pour décrire le cœur de ma relation avec Ziad, au moment où celui-ci faisait irruption à travers ses posts. En fait toute l’histoire monothéiste* peut-être vue sous l’angle du sevrage, à l’échelle des communautés comme à celle de l’apprentissage du croyant.