Ethnographie et islam
Au fond mon travail depuis quinze ans est une réflexion sur les conditions d'une ethnographie “halal”.
Mais on peut aussi parler d'ethnographie durable, une ethnographie qui ne détruit pas les rapports d'enquête qui lui ont donné naissance.
La caractère laïque de mon travail - autrement dit son caractère “d'intérêt public”, dans une perspective française - a toujours été reconnu par mes interlocuteurs académiques.
Bien avant d'être musulman, j'ai été un Français engagé sur le terrain yéménite. La conversion pouvait-elle changer la donne? C'était bien la question. Et la réponse a plutôt été négative, dans la mesure où je me suis retiré progressivement de la société Yéménite (de 2007 à 2010), et que je n'y suis pas retourné à ce jour.
Donc parler “d'ethnographie halal” ne signifie évidemment pas réserver l'ethnographie à une communauté - ce serait une contradiction dans les termes. D'ailleurs le Coran ne dit-il pas :
« Vous sont permises [halâl], aujourd'hui, les bonnes nourritures. Vous est permise la nourriture des gens du Livre, et votre propre nourriture leur est permise. » (Coran 5:5).
La notion de halâl n'implique pas en elle-même une référence communautaire, il faut simplement s'entendre sur ce qu'on appelle “bonnes nourritures”. Et d'abord sur le plan des mots.